2008/07/05 - Homélie des 5 et 6 juillet

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Depuis les quelques jours précédents ce dimanche, je me disais qu'en ce début des vacances pour beaucoup et à quelques jours des miennes, la prédication sera faite de façon allégée. Jésus, lui-même parle  du repos, c'est donc divinement fondé... Quand on a toute une année de labeur dans les pattes qu'il est tentant de vouloir en parler, parler un peu du repos juste et donc nécessaire. Mais les choses ne se sont pas déroulées comme prévu. Vendredi matin j'ai entendu à la radio  parler un psychologue interviewé au sujet de la survie de la récemment libérée fameuse otage franco-colombienne, Ingrid Bethencourt. Dans un langage clair il a exposé son affaire. Tout d'abord, constatait-il, tout être humain porte en lui le désir d'être immortel. Je crois qu'il disait exactement, que tout homme croit qu'il est immortel. A partir de ce constat deux types d'attitudes possibles, lorsque ce désir est soumis à l'évidence du  contraire.  En situation de danger de mort, il y en a  qui se réfugient dans une sorte d'illusion, d'une bulle à l'intérieur de laquelle ils tentent à survivre, ainsi déconnectés du réel. Et d'autres rationalisent, en prenant en compte tous les données pour savoir comment vivre ce qui reste à vivre.

Ayant entendu cela,  j'ai vite compris que mon repos n'était pas encore venu. Il était évident que, plutôt que l'Evangile il fallait commenter la deuxième lecture. St Paul dans la lettre aux Romains, au chapitre 8 parle de l'homme sous l'emprise de la chair à qui il oppose l'homme sous l'emprise de l'Esprit.  Nous y voilà donc dans une autre vision de l'homme. En effet, entre le psychologue et Paul il y a évidemment différence de vision de l'homme. Vision de l'homme, on appelle cela  de l'anthropologie. 

St Paul met en opposition homme de la chair et homme  de l'esprit. Le premier est celui de la terre, le second est spirituel. Chair dans la Bible signifie homme, tout homme, pleinement homme avec ses moyens et ses buts terrestres. L'emprise de la chair n'est pas seulement pour signifier les désirs désordonnés, car sans pour autant les exclure, cela veut dire une vision de l'homme terrestre pour sa vie terrestre, donc y compris  avec - pourrait-on dire aujourd'hui -tout ce qu'il y a de plus noble et humainement considéré comme ayant de la valeur par un groupe social donné.
 
L'explication de mon psychologue ne peut donc qu'être terrestre, car elle donne deux variantes de l'attitude de l'homme face à la mort. Mais quand je les compare avec la grille de lecture de l'homme selon Paul toutes deux  sont formulées du point de vue de l'homme " sous l'emprise de la chair ". Quoi de plus clair et honnête dans la démarche du psychologue ? Le problème subsiste dans la comparaison des deux visions, celle de la terre et l'autre. Que le psychologue insinue que toute attitude spirituelle qui provient de la démarche de foi (l'interview avait pour but de répondre à l'interrogation portant sur l'attitude croyante de l'otage comme gage de sa survie) n'est qu'une illusion, une sortie du réelle, l'on ne peut pas lui en vouloir. Il ne tire de conclusions que conformément aux présupposés par lesquels il définit l'homme. 

En revanche comment nous, les croyants,  nous entendons ce qu'il dit, et  comment - compte tenu de l'impact que cela a sur le grand nombre de ce qui écoutent directement ou en acquiescent indirectement -  nous faisons, oui ou non, sourde oreille. Ceci n'est pas neutre, ceci n'est pas affaire des autres, de quelques spécialistes dans le meilleurs de cas, ceci n'est pas à remettre au lendemain, vacances ou pas. Il est de notre devoir, tout en respectant les opinions, voir même les convictions des autres, de faire savoir la nôtre. St Paul monte clairement qu'à partir de l'anthropologie judéo-chrétienne,  la vision de l'homme fait comprendre à quel point l'expérience de la  foi est une réalité aussi réelle que dans d'autres cas l'illusion est illusoire et le rationalisme un point d'appui au combien efficace pour se repérer dans la vie, même si parfois il peut prendre des allures d'une idéologie parmi d'autres.
 
Pour nous les chrétiens, écouter le psychologue c'est bien, mais suivre St Paul c'est salutaire, dans la mesure où la vérité rend libre et ainsi il n'y a pas de limites à l'amour véritable.
Dans l'Evangile Jésus rend grâce à son Père d'avoir révélé des choses vraies aux tout-petits, alors qu'elles sont cachées aux sages et au savants.   En méditant  sur tout cela, sans nous prendre la tête (danger d'illusion ou du rationalisme, lequel de deux est pire, que sais-je ?),   bonnes vacances et bon repos dans le Seigneur!