2009/01/25 - Homélie - Ez 37, Lecture christologique.

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Le thème de cette année a été choisi par les  Eglises de Corée. Le geste prophétique inspiré à Ezéchiel de joindre deux morceaux de bois est l'image de la réunification des royaumes du Nord et du Sud d'Israël. " Il seront unis dans ta main ". La main du prophète représente la main de Dieu " Ils seront unis dans ma main ". Par le Prophète, Dieu fait comprendre que c'est Lui qui est à l'origine de toute unité, comme il est à l'origine de la vie, ce qui est signifié dans la première prophétie, celle des ossements desséchés qui reprennent vie par l'action de l'Esprit Saint.


Ces deux morceaux de bois, c'est Dieu qui les tient dans sa main. Et en les tenant dans sa main, il les unit.

Dans le fait d'intervenir, Dieu reconnaît leur incapacité à être unis par leurs propres moyens. Et si un jour, ils doivent être éventuellement unis, c'est grâce à lui, Dieu, ou plus exactement, c'est dans lui qu'ils seront unis. Ainsi il leur offre un lieu pour leur rencontre. Sa main devient donc ce lieu dans lequel ils peuvent reconnaître leur cassure.

En  reconnaissant cette cassure grâce à la main de Dieu dans laquelle ils sont ainsi posés, l'un en prolongement de l'autre, ils peuvent désormais reconnaître sereinement, car dans la présence de Dieu, leur difficulté, voire même l'impossibilité de faire un. Cette reconnaissance sereine n'est pas une justification de la cassure. Dans la mesure où ils acceptent cette décision de Dieu, la reconnaissance en question n'est qu'une remise confiante dans la main de Dieu à l'image de ce geste. Et cette remise confiante est la seule réponse possible que les croyants désunis puissent donner. 

Pour aller plus loin dans cette présentation de l'unité brisée, il est permis de faire une lecture christique de ce passage. C'est-à-dire voir comment ce qui semble humainement parlant irrémédiablement cassé, ne peut pas seulement être rassemblé, comme Dieu le fait, mais peut, et réellement sera, uni par la vie du Christ. Et comment ?

C'est sur ces deux bouts de bois croisés que le Christ offre sa vie en les liant par le don de sa vie. Ainsi s'accomplit l'œuvre du salut. Ainsi s'accomplit l'œuvre du salut pour tous, pour tout le genre humain. Ce qui était promis par l'intermédiaire du prophète Ezéchiel au Peuple d'Israël, c'est en Christ que cela trouve sa  réalisation universelle. Ce que la main de Yahvé pouvait faire pour le Peuple d'Israël, est fait par  le Christ pour l'humanité entière.  Ainsi, ce qui était pleuré comme drame humain où les hommes n'arrivent pas à s'entendre entre frères, en Christ trouve sa consolation. Lui, le Christ, qui était sans péché a pris sur lui les péchés des hommes. Le Christ, Fils de Dieu, uni à son Père sur la croix a uni les hommes entre eux.

" C'est lui en effet qui est notre paix, de ce qui était divisé, il a fait une unité. Dans sa chair il a détruit le mur de séparation : la haine.... Il a voulu ainsi, à partir du Juif et du païen, créer en lui un seul homme nouveau, en établissant la paix et les réconcilier avec Dieu tous les deux en un seul corps, au moyen de la croix ; là, il a tué la haine.... Et c'est grâce à lui que les uns et les autres,  dans un seul Esprit, nous avons l'accès au Père. "  (Eph 2 14-18)  

 

Toutes les situations relationnelles à deux, à trois, en société, en communauté, entre  différentes communautés, entre différentes sociétés etc. sont cruciformes. Elles prennent forme de la croix sur laquelle est clouée notre incapacité à être un. Elle est clouée, mais pas condamnée, car, au contraire, cette incapacité à être un, elle est  libérée par le Christ qui, unissant ces deux bouts de bois, en en fait le lieu de la vie. Deux bouts de bois cassés symbolisent toutes les désunions et  c'est triste. Mais les deux bouts de bois sous forme de croix c'est crucifiant. Crucifiant par la souffrance, par le mal être que cela  génère. La croix avec sa laideur, sa souffrance, peut boucher la vue du regard à qui voudrait accéder au sens qui est supposé se cacher derrière.

Mais si le regard est porté sur le Christ lui-même en croix et non pas sur les deux bouts de bois sous forme de croix, à ce moment là, par  son amour absolu, le Christ devient transparent, il n'est que lumière.       

Pour résumer !

Un constat : l'on ne peut pas unir les deux bouts de bois cassés représentant l'humanité entière,  autrement qu'en les croisant pour y faire apparaître source de la vie, le Christ en croix, lui,  qui les unit. 

Une double condition : tout désir de l'unité, nécessairement, suppose une double confiance : en Celui qui unit et en celui que représente (au singulier ou au pluriel) cet autre bout de bois. C'est au titre d'une telle confiance que tout désir d'unité est  crucifiant, et par là source de vie véritable.