2012/04/08 - Homélie de Pâques - Ils courent tous !

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I. Ils courent tous !

Marie, court seule. Les deux disciples courent d’abord ensemble, mais le plus jeune court plus vite que l’autre. Si l’un dépasse l’autre, ce n’est pas pour montrer qu’il court plus vite, comme un petit  garçon qui a un besoin vital de se montrer capable de courir de plus en plus vite. 

Le plus jeune disciple court plus vite, car il est tellement poussé par le désir de voir de ses propres yeux, que rien ne l’arrête.  Chacun court à partir du moment où le frémissement de leur cœur les a mis en mouvement. 

Chacun court à sa vitesse. Chacun dans  une direction ou dans une autre :
- Soit ayant constaté la chose, c’est-à-dire quelque chose d’extrêmement important.
- Soit  pour vérifier ce que les autres ont compris, pour savoir si l’on pouvait y donner crédit.

II. Qu’est-ce qu’ils ont constaté ?

 La présence des  linges qui enveloppaient le corps mort. Ce sont des pièces à conviction pour constater que, contrairement aux rumeurs qui se sont vite répandues,  le corps ne fut pas volé. Mais leur enquête ne s’arrête pas là.

Aucun, à aucun moment de leur existence, ni avec la rencontre avec Jésus ni durant le rude apprentissage à l’école de disciple, à aucun moment ils ne pouvaient s’imaginer une chose pareille ! Du tout, du tout !  Dans toute la bible pas une seule trace indiquant que le messie devait ressusciter. Personne n’était préparé  à une chose pareille. Et tant mieux, vous me direz, car ainsi au moins leur manière d’adhérer à la nouveauté a quelque chose de tout frais, d’unique, et ils devaient  prendre conscience de la révolution intérieure qui était en train de se produire en eux. 

  En effet, ils n’avaient pas fini de ranger les affaires de leur foi, mais cette fois-ci, ils devaient procéder dans un nouvel ordre. Certes, ils connaissent bien la bible, mais avec ce qu’ils viennent de constater, il va falloir reprendre tout à partir de cet événement-là.

III. Une relecture s’impose.

L’évangile de Jean nous fournit de beaux exemples  d’une telle reprise, d’une telle relecture. Prenons-en seulement deux !

Lorsque Jésus est au temple où il fait le ménage à sa manière, les disciples, note Jean,  ‘les disciples se souvinrent qu’il est écrit : le zèle de ta maison me dévorera’ (ch.2,17). Puis ‘aussi lorsque Jésus se leva d’entre les morts, ses disciples  se souvinrent  qu’il avait parlé ainsi (c’est-à-dire que le troisième jour il relèverait le temple en trois jours en parlant de son corps) et ils crurent  à l’Ecriture ainsi qu’à la parole qu’il avait dite’.

 Les disciples crurent aux deux : aux paroles de Jésus et aux Ecritures. Deux canaux d’autorité, inséparables l’un de l’autre.

Le second exemple nous vient de l’épisode de l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem, ce que nous fêtions le dimanche dernier, celui dit des rameaux. Notre souvenir en est encore tout frais.   Jésus leur demande de préparer une entrée ‘royale’ toutes proportions gardées, et Jean note, qu’ ‘au  premier moment, ses disciples ne comprirent pas  ce qui arrivait, mais lorsque Jésus fut glorifié, ils se souvinrent que cela avait était écrit à son sujet.’ (ch12, 16).

Bien des paroles et des gestes de Jésus demeurèrent incompris, c’est seulement la résurrection  du Seigneur qui leur a permis de retrouver au fond de leur mémoire ces faits et d’en pénétrer la véritable signification, avec l’aide des Ecritures.  Jean note aussi pour d’autres exemples d’une telle relecture, que celle-ci s’opère  sous la motion de l’Esprit. Nommé ou pas, certes, l’Esprit est  toujours au coeur de tout acte de foi et ou au nom de celle-ci.

IV Il faut un bon décodeur.

Les disciples ont fait la découverte de la résurrection de leur maître en direct. Désormais, ils disposent d’un code pour réinitialiser leur mémoire, aussi bien celle de leur Seigneur lorsqu’ils étaient à l’école et faisaient l’apprentissage d’être disciple, que celle des écritures.

En ce jour de Pâques je ne peux que nous souhaiter à prendre au sérieux l’abonnement à un tel décodeur, non pas pour ainsi être en dehors de la vie sur terre, mais, bien au contraire, y être au centre véritable, y être plus.      

Ah, j’allais oublier, comme disait st Anselme au XI siècle, ‘il ne faut pas comprendre pour croire, il faut d’abord croire pour comprendre’.

Puisque la foi est un don surnaturel, procéder dans cet ordre-là c’est donc  une question d’honnêteté intellectuelle.   Et puis,  vous en ferez ce que vous pourrez.  Après tout, Dieu doit avoir le code d’accès à chacun de nous, pas seulement par les voies que nous lui indiquons. Mais c’est une autre histoire et peut-être  pour une autre fois.

Maintenant, que la joie de la résurrection du Christ, qui promet la nôtre, envahisse suffisamment nos cœurs, de sorte que nous puissions en rayonner autour de nous et être des porte-lumière, des photophores d’une telle espérance.