2012/06/26 - Homélie - ICP/IER St Joseph de Carmes

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Dans l’Evangile,  Mathieu livre des recommandations au sujet d’une vie chrétienne bonne. Pour le lecteur avisé que nous sommes, cela suppose que l’on procède à quelques réajustements, modifications, changements,   une conversion en somme. Après la correction de vue pour bien voir où est la poutre et où  est la paille, nous voici devant un autre atelier de  réparation : « Vos perles, ne les jetez  pas devant les cochons ».


Bien voir et bien agir, et bien juger : voir, juger,  agir ; bien juger ce que l’on voit et bien juger ce que l’on fait. Ezekias à la fin du VIIIe siècle, dans la première lecture, a jugé la situation de son royaume (Juda) par contraste avec des mauvais choix d’alliance de ses prédécesseurs.  Belle prière pleine de confiance et belle promesse d’un reste fidèle qui subsistera.


Faire de la théologie c’est aussi voir, juger et agir, comme la Parole de Dieu nous y  invite. C’est  faire de la relecture de la vie et par conséquent vivre dans  la nouveauté, dans l’émerveillement, l’émerveillement d’avoir trouvé des perles c’est-à-dire la sagesse du Christ.


Je vais vous en raconter une : dans les cadres de la préparation au mariage, je demande aux futurs mariés de lire un de quatre évangiles. « Quand on te frappe sur une joue tu lui tends l’autre ».  Mt5,39. Tout passe mais pas cela. Ce n’est pas naturel dit-il, ‘non en effet, car c’est surnaturel’, Une perle, la sagesse du Christ s’est présentant devant lui et il l’a accueilli avec immense joie Il comprend et s’exclame devant sa belle au regard émerveillé, ‘alors toutes ses années  c’était pour rien ! Enfin j’ai compris’. Il a compris que ce qui est surnaturel doit être accueilli comme tel et cela libère. 


De fait, qu’est-ce qui mobilise nos vies, nos  énergies, sinon  la connaissance de la sagesse du Christ ! Faire de la théologie c’est mettre tout en oeuvre pour parvenir à trouver des telles pépites dans les biscuits de nos  existences que le temps mange peu à peu, alors que ces perles sont des lumières qui guident permettant de bien voir et par conséquent bien agir.


Alors vos perles, ne les jetez pas devant les cochons.   Le caractère brusque et incongru, imprévisible ou plutôt prévisible d’un comportement indigne est évident. Ces cochons, certes, les exégètes y  voient des païens, et des païens se cachent chez les chrétiens que nous sommes, cela va de soi. Alors si les uns et les autres traitent les perles comme des cochons l’auraient fait, ne vaudrait-il  pas mieux s’en abstenir, s’abstenir d’agir devant eux, allant s’occuper uniquement  de ceux qui veuillent bien suivre le Christ ? La tentation est grande, mais qui se présente sous le mode d’un sacré dilemme.


Certes, le Christ tout en le disant, a pris le risque de se faire déchirer, laisser sa peau.  Sa mise en garde comporte une attention à avoir au sujet de la réception. Mais comment donner envie de recevoir ? Rien que dans les célébrations de mariage ou de baptême etc. où les perles de la sagesse du Christ étalées aux moyens de la célébration des mystères du salut sont exposées  au risque semblable, celui d’être piétinées.


Comment donner envie de boire à un âne qui n’a pas soif ?  Boire soi même comme du petit lait. La pédagogie de la nourriture suppose faire de la bonne cuisine. Les passants savent naturellement distinguer entre les odeurs qui invitent et ceux des plats cramés qui n’y invitent pas.


Et la cuisine est bonne dans la mesure  où on la partage avec joie. Le TG sur la théologie de la nourriture à partir du texte de G. Kowalski le disait si bien. Les perles, la sagesse du Christ, on les porte à la connaissance des uns des autres au travers les vraies rencontres en partageant le repas.


Alors ses perles par quelle portes faut-il passer pour les trouver, quel est-(il) le chemin qui y mène ?  


Au risque de forcer le sens de l’expression de l’Evangile, on sait que d’un côté, la voie, le chemin, la route de la théologie  sont /est large et sont nombreux ceux qui s’y engagent. La vitalité de l’Eglise se mesure à l’aune de la fréquentation des lieux de formations théologiques notamment  par des laïcs (actuellement la France semble être dans une dynamique positive faisant figure d’une heureuse exception). En effet, quel bonheur de découvrir toutes ces/(ses) perles  que personne ne pourra voler.


De l’autre côté, cette voie, ce chemin sont étroits,  parce que  l’exigence avec laquelle il se présente force à entrer non seulement dans l’émerveillement devant tant et tant de découvertes des perles de la sagesse du Christ, mais suppose une véritable relecture de la vie. Mais fort heureusement, des ateliers de correction de vue et d’un agir bon sont disposés sur la route de nos vies en général. Et la théologie enseignée à l’IER en fait partie. Ainsi nous entrons par la porte étroite de la méthode d’apprentissage de la vie, celle du Christ qui se donne en nourriture.  Et de cette nourriture, il y en a pour tous ceux qui se présentent, ce reste qui porte les perles de la sagesse du Christ de façon consciente et assumée. Et quand il y en a pour quelques uns – curieuse proportion divine, il y en a aussi pour tous.