2017/10/20 - Journal - Marrakech

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Me voici dans les portes de ton royaume. Le plus à l'ouest de ton Orient. Le croissant reste accroché à la corniche d'or, là-bas, au berceau. Ici, c'est la queue de sa comète lunaire qui de son éclat argenté touche  le bout d'un  monde à terre. C'est par là-bas sur la rive  méditerranéenne que voulait fuir Jonas.  Au bout du monde, dans un far-west que rien ne pouvait  dépasser. C'est là que se croisent et trouvent leur aboutissement savoureux les routes du nord et du sud en formant avec la route de l'est un immense Tau bien céleste. 


C'est ici, à l'ombre d'un soleil de plomb et sous le toit bleu, de jour comme de nuit  (dessin étoilée faisant la différence) que sont venus se dire oui ces deux-là qui nous ont réunis dans ce lieu, pour beaucoup bien exotique.  Elle issue de pieds noirs, lui n'en ait pas en reste aussi. Je loge dans un riad à plusieurs étages avec une terrasse depuis laquelle on peut apprécier la ville, tout ce qui s'y passe  et tous ceux qui s'y entassent. Savoureusement agrémentés des chants d'oiseaux  (même le coq s'y met à ses heures perdues) les bruits de la ville enveloppent de leur aura sonore la plaine surélevée par le plateau de constructions dont seules les tours carrées des mosquées piquent à propos leur nez vers le haut.
Une messe de mariage comme très rarement il en fut. Sans mirage désertique, la vérité d'amour enchantée et crue, pleine  de promesse à croquer se  pose  tel un masque transparent sur les visages des deux amoureux qui osent s'unir ici.


Le lendemain heureux, chez la marraine qui reçoit en reine tout aussi joyeuse que chargée d'un ciel bleu.
De retour à la maison, un chouia de participation à la préparation du repas du soir, en compagnie de deux femmes dont l’une parle très bien le français. Une présence douce et bienveillante sans soupçon de méfiance, tout  en confiance, le reste n'a plus d'importance. On parle de la pluie et du beau temps. Il fait sec, si à la fin du mois il ne pleut toujours pas, on va prier..., les hommes vont prier!, précise l’une  d'entre elles. Je prends une crêpe et me retire tout joyeux.
Le dernier jour. La visite de la ville, la partie de l'ancien quartier juif. Musée juif, synagogue.


Musée dans une grande maison autrefois occupée par  une ou plusieurs familles juives. Mélange de musée et d'auberge ou on peut dormir et se  reposer. Les propriétaires sont en Israël, mais ils  y reviennent tous les ans. Le gérant est un chrétien. Le roi Mohamed VI l'a visitée  en  compagnie de son Ministre des Finances,  un juif. Et moi, je le visite en compagnie d'un jeune berbère qui travaille ici depuis peu. 
Je dois revenir chez le marchand d'épices, d'encens, de rouge à lèvres, d'eucalyptus pour soigner le rhume etc. Je le lui ai promis. J'achète ce dernier pour soigner le rhume.


La visite de la synagogue et l'histoire de la communauté juive au travers les siècles consolident imaginaire et connaissances. 
Je reviens au musée juif et à son snack-bar du Chameau rouge. Im  Gespräch vergeht  die Zeit. Un groupe de trois hommes à table à  côté.  L'un d'eux en fauteuil roulant.  Il s'arrête devant moi, un échange s'engage.  Je viens de Dubai, j'ai des problèmes de circulation de sang qui....
Ils sont partis. Le temps circule dans un seul sens où tout va, tout s'en va, mais pas forcément à la va vite. Je prends mon temps. Temps d'immersion en restant là à lire le livre sur la ville de Marrakech. Les oreilles pleines de sons arabes, encore un chouia que je viens de reconnaître. J'ai envie de dire eucharistos (un autre nom que l'on se plaît à reconnaître à l'autre bout de la méditerranée) Eucharistos à la vie et à tout ce qui la sous-entend, sous-tend et soutient, et dans laquelle jamais à l'étroit je me contiens. En effet, das jedoch machen mir keine Sorgen. And some of that time has taken up residence in my riad. 
Le dernier matin j’ai assisté à la naissance du soleil accouché par l'Atlas pour une seule journée,  une de plus. Le soleil y continue son inexorable marche sur le ciel bleu en compagnie des humains. Pour passer le relais à la lune, et les hommes pour passer le relais aux étoiles. Et la vie continue.