2011/01/18 - Journal - Une messe et deux ordinations.

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Une célébration qui restera dans la mémoire de beaucoup. L'église st Geneviève de Garges-les-Gonesse pleine à craquer, le curé n'y a jamais vu autant de monde. Deux séminaristes, originaires d'Afrique ont fait le choix  d'être au service de l'Eglise  du diocèse de Pontoise  qui est dans le Val d'Oise. Trois heures de célébration et pourtant personne n'a trouvé celle-ci trop longue,  même le fait d'être debout  semblait  facile à supporter.

S'impose alors le constat de l'extraordinaire rencontre du rite latin et de la sensibilité africaine. Ce rite qui a été élaboré dans et avant tout  pour le monde européen  occidental y a parfaitement intégré l'expression africaine.  Les mélanges d'expressions culturelles différentes sont possibles lorsque le fond commun est communément reconnu. Ce fond est constitué de la même foi. L'engagement plénier avec lequel les participants donnent du " tonus "  à la célébration est possible parce que la foi traverse et 'anime'  toutes les dimensions de leur être.

Trois interrogations sur le mode occidental de vivre la foi :
-Sur l'impossibilité pour la culture occidentale d'exprimer la foi de la sorte
-Sur sa transmission,
-Et sa capacité  à accueillir les autres expressions.

1° Après avoir  vécu cette célébration pleine d'entrain,  marquée par la joie d'être ensemble et le dire avec les chants, les paroles, l'écoute, les yeux et les mains, de la tête aux pieds, comment ne pas s'interroger sur la difficulté occidentale à exprimer la foi chrétienne ? Sans entrer dans des considérations d'ordre historico-culturel à partir desquelles l'on aurait pu oser formuler quelques hypothèses pour tenter d'expliquer le pourquoi du comment, contentons-nous d'un constat d'ordre général. La difficulté  touche toutes les couches de la société et toutes les générations. Faut-il considérer cela comme une fatalité ou plutôt comme une invitation au dépassement d'une telle  situation ? Il me semble que l'amorce de réponse peut venir de la capacité à accueillir les autres  expressions culturelles.

2° La difficulté se voit aussi dans la transmission. La foi  n'a pas seulement  du mal à se dire mais  elle a aussi du mal à transiter d'une génération à l'autre. Comme si culturellement une sorte de verni recouvrait la surface des êtres  humains et ceci dès leur petite enfance,  empêchant ainsi toute possibilité de  gérmination et d'enracinement  de la Foi, comme acte confiant et librement consenti pour son  bien propre et celui des autres.  Et si, par chance malgré la présence d'un tel verni on assiste à l'accueil désiré et assumé, l'enracinement est mis à mal par la contamination qui se trouve dans ce verni. Le verni est en effet contaminé par un  virus très puissant, non seulement à cause de sa capacité de nuisance directe,  mais également à cause de sa capacité de mutation. Ce virus infecte toute rencontre avec l'intuition  croyante. Il s'agit de la puissance de soupçon comme base, comme mode opératoire relationnel. Le soupçon qui est visé ici n'est pas l'interrogation, ô  combien légitime,  sur la capacité à lire la réalité. Il s'agit d'un système programmateur de l'autodéfense grâce auquel l'individu pourra échapper à toute emprise sur sa liberté.

3° Ces deux constats  posent la question de la transmission de la Foi ou plus exactement celle des conditions de son apparition. La difficulté à exprimer et à transmettre nous interroge  sur la capacité  que ceux du vieux continent, ont et auront, à accueillir le souffle d'expression pleinement engagé de la foi portée par les chrétiens venus d'ailleurs. Mais aussi inversement,  c'est probablement à condition d'une telle réciprocité que la foi chrétienne survivra en Occident et ailleurs. Merci à Ange et à Parfait d'avoir exercé, dès le berceau de leur ordination diaconale,  cette diaconie qu'est  la charité et qui consiste à porter la foi des uns et des autres et d'avoir permis de le vivre à tous ceux qui s'y trouvaient. Et bien au-delà !