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2009/03/12 - Conférence-débat - CALVIN (1509-2009), regards croisés

Category: Exposés et dialogue sur divers thèmes de religion
Créé le jeudi 12 mars 2009 17:58

Dans le cadre du cinq centième anniversaire de la naissance du réformateur et théologien du protestantisme Jean Calvin (1509-1564), l’équipe œcuménique d’Ile-de-France proposait le 12 mars à Issy-lès-Moulineaux une soirée avec Gill Daudé (pasteur réformé), Nicolas Kazarian (théologien orthodoxe) et Rémy Kurowski (dont la contribution est reprise ci-dessous).

 

PLAN :
Regard partiel sur la 
1. Biographique de Calvin
2. Sola Scriptura, tota Scriptura
3. Ecclésiologie
4. Questions suscitées

 

1. Quelques éléments biographiques


-la mère décède très (trop) tôt
-le père décède " trop tard ", en laissant le sentiment de quitter la prison
-conversion subite incontestable : autrefois obstinément adonné aux superstitions de la papauté " trop endurci en de telles choses " et il eut été " bien malaise " qu'on le " pût tirer de ce bourbier  si profond"... Mais Dieu intervient
-attachement " exclusif " aux Ecritures ; à la recherche de la pure doctrine (à la suite de Luther) et à la recherche de la vie sainte, cet attachement exprimé dans un contexte intellectuel d'humanisme et d'amour de la dialectique.
-De l'Institution chrétienne et de la gestion de la Réforme à Genève ; les deux lieux phares où se croisent, voire s'entremêlent, certainement s'expriment sa vie et sa pensée très étroitement liées l'une avec l'autre.


2. Sola Scriptura, tota Scriptura :


Calvin et les autres réformateurs ont tout misé sur les Ecritures. Si pour Luther il est question de l'Ecriture seule, sola scriptura, Calvin envisage un rapport plénier à l'Ecriture, tota scriptura.  Mais les catholiques  (les papistes) n'étaient pas en reste1. Ils y travaillaient aussi. Moins intensément peut-être, car sur un autre terrain, celui de la tradition catholique accumulée depuis tant de générations. Or, les Réformés n'avaient plus à gérer cet encombrement avec lequel les catholiques devaient composer et donc, eux les Réformés pouvaient s'adonner sans retenue à l'étude de la Bible.
Sola scriptura étant devenue la préoccupation principale,  tout de même pas la seule, car la vie obligeait à organiser les communautés en tenant compte de paramètres socioculturels, comme à Strasbourg ou à Genève, ce qui n'était pas une chose gagnée d'avance. Les Réformateurs en sont devenus des spécialistes et dans la comparaison à une course à pied, celui qui s'entraîne plus logiquement va plus vite et a une meilleure endurance. D'où la mise à distance des catholiques par les Réformés. Mais le fait d'être distancés par les Réformés prouve déjà que les catholiques étaient bien présents dans la course qui d'ailleurs a été entamée bien avant XVI siècle2.

 Cette distanciation entre les catholiques et les réformés est visible encore aujourd'hui et ceci en dépit  de tous les efforts auxquels les catholiques ont consenti depuis quelques générations. Et le dernier synode des évêques à Rome en 2008, consacré à la Parole de Dieu et à sa proclamation, est à la fois une précieuse rampe de lancement ou du moins d'accès pour ce mouvement qui exprime l'intérêt pour la Parole de Dieu, tout en étant  le témoin, encore un mais toujours et sans cesse, du retard que même cette initiative ne pourra pas combler de sitôt. Il suffit de songer à la qualité des prédications, chez les catholiques : malgré les efforts fournis, elles ont du mal à être véritablement exégétiques pour garantir le lien avec les développements parénétiques à proprement parler. Globalement, probablement toujours pour la même raison à savoir que même si la culture catholique de la prédication, malgré tout enracinée dans le terroir de la tradition à proprement parler catholique, permet de s'appuyer bien plus largement que sur la seule Bible pour dire la parole de Dieu - la création comme parole de Dieu et la culture ambiante d'une époque, donc la tradition passée ou présente-  cependant, le lien entre l'exégèse à proprement parler et la tradition catholique n'est pas bien assuré. Le débat pourrait faire revenir sur ce point.

3. Ecclésiologie de Calvin.

A. Introduction :

- La Parole de Dieu pour qui ? Pour le croyant ! Mais le croyant peut-il être tout seul ? Nullement. En communauté, en Eglise, assurément ! Pourquoi ainsi ? Pour honorer Dieu de façon juste ! Car, selon Calvin,  " l'humanité est créée pour la louange de Dieu et le but de la rédemption est qu'il y ait un peuple qui glorifie le nom de Dieu et l'honore de façon juste "3.  En  m'appuyant sur cette citation je voudrais  présenter l'ecclésiologie de Calvin. Son ecclésiologie touche à la fois à l'universalité et, par conséquent, porte des traits propre à la dynamique œcuménique.
- Calvin a une conscience très aiguë de la catholicité de l'Eglise. C'est la raison pour laquelle il va en 1561, écrire un texte dans lequel il s'opposa à l'identification entre ecclesia catholica et sedes romana.
- Aujourd'hui, dans la situation de l'éveil œcuménique évident, il est plus facile de dire ce que les autres apportent à la compréhension de l'Eglise dont nous faisons, le cas échéant, partie! Ainsi Vatican II dans Unitatis Redintegratio, n° 4 dira que dans les autres confessions également se trouvent les éléments authentiquement catholiques. Et comment ici ne pas faire mention de l'apport considérable de Calvin dans la compréhension de ce que l'Eglise telle qu'elle est présentée par ce même concile Vatican II : C'est à Calvin que nous devons la présentation de l'Eglise sous l'aspect de trois munera (Constitution dogmatique sur l'Eglise, Lumen gentium no 34, 35 et 36).
- Je m'arrêterai uniquement sur trois aspects de son ecclésiologie : sur la question de la catholicité, celle de la diversité dans son rapport à l'unité, et celle de l'unité dans la diversité.

B. " La pensée de Calvin est à la dimension du monde "4

Dans le Catéchisme de 1545 l'attribut " catholique ",  incontestablement, fait partie de la compréhension de ce qu'est l'Eglise. L'Eglise est catholique ou universelle, parce que tous les fidèles sont rassemblés sous un seul chef et dans un seul corps. Le regard de Calvin va plus loin que vers l'Eglise de Genève. Calvin pensait dans les dimensions européennes et œcuméniques5.

C. La diversité dans l'unité.

Pour Calvin, la diversité n'est possible qu'à condition d'être tous dans l'unanimité de la foi. L'unanimité en question est obtenue grâce à l'acceptation des vérités essentielles la garantissant. Pour Calvin en font partie celles qui portent
-sur la foi en Dieu unique,
-sur la divinité de Jésus-Christ,
-sur le fondement du salut dans la miséricorde divine et
-sur la pratique des sacrements " conformément " à l'institution du Seigneur.
 -Le tout couronné par le témoignage commun de la foi.

D. L'unité dans la diversité.

Dans les choses communes se retrouvent les dispositions voulues par Dieu et, de ce fait, nécessaires à l'Eglise (prédication de la Parole de Dieu et les sacrements). Dans ce qui diverge se trouvent les libres dispositions  des Eglises qui peuvent varier et qui peuvent se référer aux habitudes culturelles. On les appelle les ordonnances ecclésiales. Au sujet de l'Eglise de Genève, Calvin estime qu'elle a de quoi être reconnaissante du fait que Dieu a choisi  d'y établir une demeure, où il est vénéré de façon pure. La pureté, voici ce qui est désiré par Calvin.

4. Les questions que tout cela pose.


A. La recherche de la pureté, ou plutôt l'exigence liée à l'appartenance confessante, est une de premières caractéristiques. Par exemple, à Strasbourg 250 personnes se regroupent  autour de Calvin, leur exigence de vie de foi est comparable à seule de vie monastique, mais sans se retirer du monde.  Cette exigence, tout autant estimable, n'était-elle pas vouée à l'échec, ce qu'à tout instant la vie du croyant peut prouver ? Si l'homme ne peut rien sans le secours de la grâce, et qui peut nier cela ?  (Même si par-ci, par-là, des pensées pélagiennes  alimentent bien  des discours  humanistes des chrétiens), donc il tombe chaque fois lorsque cette grâce n'est pas accueillie à la mesure de l'attente (?)  que Dieu exprime à son égard et pour son salut !
Calvin le sait, il apprend à composer avec. Il le fait au moyen de la distinction dialectique entre l'Eglise, réalité sociologique, et l'Eglise Una sancta. L'article de Jacques Courvoisier est à cet égard très éclairant, en voici le passage suivant : " La dialectique, l'Eglise, réalité sociologique, tire sa qualité d'Eglise de l'Una Sancta, de l'Epouse du Christ, et cette dernière à son tour, s'incarne visiblement pour que les âmes soient amenées à leur Sauveur par la prédication et les sacrements, car l'Una Sancta doit nécessairement s'affirmer par une réalité sociologique. Là, où cette dernière est absente, l'Una Sancta le serait aussi. Un des aspects n'est rien sans l'autre et l'Eglise n'existe que dans le mouvement de l'un à l'autre et réciproquement "6. Calvin  traite la question de l'Eglise par deux voies : visible et invisible pour considérer leur dépendance au moyen de la dialectique. Exemple : Eglise -mère des fidèles :'être membre du corps du Christ c'est d'appartenir à l'Eglise visible7. Pour comprendre ce que l'Eglise selon Calvin, il faut constamment faire va et vient entre Visible et Invisible.  Cette Eglise-là est constamment en mouvement et la dynamique ainsi constatée est du au fait que la Grâce de Dieu n'est pas dans le signe visible, mais que ce signe seulement l'accompagne. Ce qui est dit de la conception du sacrement chez Calvin, est-il transposable sur ce que pour lui l'Eglise ?   Si oui, est-ce que cette analogie n'éclaire pas la façon dont est considéré par Calvin accès du croyant au pardon ? 
De son côté, St Augustin, dont la vision sur les effets du péché sur la nature humaine fut reprises par  Calvin tout comme par  Luther, dans sa vision de l'Eglise, a introduit la notion d'Ecclesia mixta. Ainsi, il constate que cette Eglise, communauté de croyants, est à la fois sainte et composée de pécheurs qui, éventuellement sont en passe de devenir  saints et ceci par le pardon. Cette Ecclesia est donc mixte, à l'instar des paraboles du bon grain et de l'ivraie (Mathieu 13), en attendant la fin des temps pour pouvoir faire la séparation définitive entre les uns et les autres. Alors, quel est le rapport  de Calvin à l'eschatologie ?


B. Calvin, pour vivre décemment sa foi, était obligé de se mettre à l'abris des " papistes " sans pour autant pouvoir éviter le danger de mort de leur part, mais primait la pureté de la foi. Quelqu'un qui le connaissait bien, St François de Sales, fut animé exactement d'un même désir et soumis exactement aux mêmes dangers physiques de la part des calvinistes. St François, par sa douceur, la même que celle qui animait Calvin, voulait retenir les autres dans le giron de l'Eglise romaine, la catholica. Mission impossible : l'organisation de la société par ville ou par principauté dans une grande partie de l'Europe a certainement favorisé le développement de la Réforme hors l'Eglise " papiste "8 , et, inversement, la structure bien centralisée de la monarchie surtout française a grandement contribué à l'éloignement des réformés, chassés hors des églises et hors du royaume. Une belle bagarre en perspective. Bagarre, où autrefois se croisaient les armes, mais qui aujourd'hui se limite, fort heureusement, au fait de croiser nos regards sur Calvin, sa postérité et  notre désir d'y voir signe de Dieu avec sa grâce qui peut tout.  

 


1  Cahiers Evangile, supplément no 146 consacré à  La Bible lue au temps des Réformateurs, décembre 2008
2  Cahiers Evangile, supplément, no 146, 2009
3  Calvin, CO 37, 406 (commentaire d'Is 63, 18), d'après Eva-Maria Faber, Le peuple qui glorifie Dieu, regard catholique sur l'ecclésiologie de Calvin, in Unité des chrétiens, janvier 2009.
4  Eva-Maria Faber, op. cit. p. 13
5  idem.
6  Jacques Courvoisier,  La dialectique dans l'ecclésiologie de Calvin, in Revue d'histoire et de philosophie religieuse,  no 44, PUF 1964    p. 348-363, la contribution au colloque  organisé par la Faculté de Théologie Protestante de Strasbourg, les 25,26 et 27 mai 1964, à l'occasion de la commémoration du quatrième centenaire de la mort du réformateur. 
7  De L'Institution chrétienne, IV, 1,4.
8  Curieusement, je trouve dans cette expression de la tendresse, un aveu  de l'incapacité à s'entendre et laquelle est cependant confiée à la miséricorde de Dieu.

                                                                                                         

2009/03 - Article - Ecclésiologie de Calvin

Category: Points sur des thèmes de religion - Documents liés
Créé le dimanche 21 mars 1909 14:29

Exposé présenté lors du pélerinage Genève-Annecy-Taizé "Sur les pas de trois témoins de la foi : Calvin, St François de Salles et Frère Roger", du 18 au 21 mars 2009 avec l'équipe du service œcuménique diocésain.  

Ecriture et Tradition

Le principe majeur de la Réforme " sola scriptura " pour Luther et son expression sœur " tota scriptura " pour Calvin conduit inéluctablement à mener une réflexion sur la " tradition ". Pour les Réformés cette réalité, telle qu'elle est véhiculée par les " papistes " donc dans les cadres de la structure traditionnelle (ministère ordonné fondé sur la succession apostolique et le gouvernement), n'a plus de raison d'être, tandis que pour les Catholiques le rapport à la tradition est un prolongement de la compréhension de ce que nous avons trouvé dans les Ecritures. L'idée de Calvin était de rompre avec la tradition de l'Eglise, mais cela ne reflète pas l'ensemble de sa pensée théologique, il demeure par exemple très attaché à la réflexion des Pères de l'Eglise pour nourrir sa pensée théologique. Ce renoncement avec la structure traditionnelle implique cependant que le rapport normatif à la foi passe uniquement par les Ecritures. Or les Catholiques perçoivent dans la tradition comprise à leur façon quelque chose de positif, pour eux, c'est une sorte de prise de conscience qui passe par des canaux culturellement marqués. Même si Calvin dans son rapport à la tradition fait table rase (tel un encéphalogramme plat), l'homme a malgré tout besoin  d'un moyen pour pénétrer  et découvrir la vie de Dieu. Pour les croyants catholiques cela ne se peut que grâce aux représentations et concepts  environnementaux  (le décor pour faire simple).  Le grand bénéfice que les catholiques  tirent de la critique de la tradition catholique par Calvin est celui de l'attention attirée par le réformateur sur la distinction entre ce qui relève de la pure contingence  historique et encombre (les superstitions etc.) et ce qui est porteur du message spirituel, tel qu'il est déjà présent dans les Ecritures.  

Philosophie et théologie

Le rapport normatif des compréhensions dans la foi au Christ (il se nourrit de sa présence)  se transforme et évolue forcément au cours des temps. Le rapport au sacrement s'appuyait sur la philosophie ontologique (de l'être) mais celle-ci est supplantée par la philosophie nominalise à la fin du Moyen-Age. Le nom est une appellation extérieure aux choses, ce qui fait qu'il n'y a pas de relation entre le signifiant et le signifié, cela va donc à l'encontre de tout principe universel, mais alors même  la raison n'est plus universelle (cf. Benoît XVI dans raison et foi). En revanche la philosophie grecque a quelque chose d'universel envers le fonctionnement humain, et c'est en ce sens que Benoît XVI réagit. Nous voyons donc bien que la réflexion philosophique se tient au cœur de l'enjeu de la Réforme, c'est pourquoi celle-ci va se déployer sur la ligne de fracture entre la philosophie et la théologie. Pascal est le dernier à maintenir le lien entre théologie et philosophie. Alors Descartes (avec la nécessité du doute), Spinoza (avec son postulat sur l'évidence) qui  met de coté la théologie car il traite davantage du déisme, Kant puis Hegel détricotent ce lien. Dans l'histoire de la philosophie il y a trois grandes phases dont chacune marque une étape de l'évolution de la réponse à la question " ou se trouve la clef pour affronter le sens de la vie, où sont les idées susceptibles de fournir des réponses ? ". Pour les grecs  ceci se trouve sans dans la nature (Aristote), soit dans le monde  de l'au-delà (Platon), alors que pour le monde moderne elle se trouve  dans l'esprit humain (Descartes) donc dans la conscience qui s'avère être un moyen de concrétiser l'expression humaine, et celle-ci est au cœur de l'enjeu de la foi.  Du reste Calvin a fait partie des humanistes qui ont essayé de négocier cette relation entre philosophie et théologie.

La grâce

Pour Calvin dénoncer la tradition comme une sorte de carcan, c'est une prise  de conscience de l'humain dans son autonomie. Même Sartre pensait que si Dieu existait, rien ne dispensait l'homme de sa propre responsabilité. D'ailleurs le défi se place à ce niveau pour les Catholiques. A partir de là, Calvin allait plus loin que Luther, Il est difficile pour les catholiques de comprendre les notions de grâce gratuite et de grâce ontologique  offertes aux hommes croyants. En effet cette dernière est invisible tandis que les signes, eux, sont visibles. A partir du concile de Trente (1545-1563) il est dit que  la foi est bien un don de la grâce et c'est à ce titre qu'elle est un fondement de notre salut. Cependant cela n'exclut pas la nécessité des sacrements (baptème, eucharistie) donc de la chose visible, or pour Calvin ce n'est pas le cas. Si nous faisons un effort pour entrer dans le raisonnement de Calvin, la grâce se suffit à elle-même : pour les réformateurs la grâce identifiée à quelque chose est de l'idolâtrie. Quand nous abordons la question de la médiation sacramentelle, c'est impensable pour Calvin car l'idée de Dieu comme " Tout Autre " ne se  réduit pas à notre imaginaire, Dieu n'est-il pas souverain et libre ? En vertu de cela même l'Eglise n'a aucun rôle dans la communication de la grâce. Tout soupçon de transgression de cette ligne rouge est considéré comme superstition et ce fut le combat de Calvin et Luther. A cette époque, tout comme sans doute et avant et après, l'Eglise Catholique était entachée d'excès  à cause de l'incapacité du clergé, des évêques et du pape, et ceci malgré des efforts fournis, à maîtriser les comportements superstitieux d'une religiosité idolâtre. Cette distorsion est irréconciliable entre la grâce donnée librement par Dieu (sola fide) et les signes visibles, car la grâce de Dieu ne peut être enfermée dans un objet matériel, cela a une répercussion sur la Sainte Cène.

Eucharistie -Sainte Cène

En fait la théologie de la Sainte Cène permet de comprendre la théologie de l'Eglise.  Le dilemme consiste à  reconnaître ou non si le Christ est bien présent dans les espèces (pain et vin).  A l'initiative de Philippe de Hesse en 1529, Luther et Zwingli vinrent au château de Marbourg pour discuter de leurs thèses.
     -Pour Luther, cette présence est réelle, il croyait à une impanation et une consubstantiation (" hoc est corpus meum ").
     -Pour Zwingli, cette présence n'est pas réelle, il interprète symboliquement les mots du Christ. 
La position de Calvin était médiane, il parlait de présence spirituelle du Christ, rendue réelle par la présence du Saint-Esprit.
Il faudrait voir comment ils se référaient à Saint Augustin qui distinguait trois corps du Christ:
     le corps physique
     le corps eucharistique (présent à l'eucharistie)
     le corps glorifié.
L'union entre le corps eucharistique et le corps glorifié ne se fera qu'au moment de la parousie.

Conception de l'Eglise

La vision de l'Eglise chez Calvin réside dans le rapport entre l'esprit du croyant et son signe extérieur, c'est-à-dire l'Eglise visible et l'Eglise invisible. A ce propos le pasteur Jacques Courvoisier (1964) dans un colloque sur la dialectique dans l'ecclésiologie de Calvin, parle d'irréconciliabilité entre l'Eglise visible et l'Eglise invisible. Pour les catholiques elle tient plus de la matrice que de la réflexion théologique. Pour Calvin l'Eglise est sociologiquement visible alors que l'Eglise invisible est " Una sancta ". Cette  dialectique signifie que l'Eglise  naît à tout moment -la grâce circule, la prédication (écritures) est assurée, les sacrements sont célébrés- ce va et vient se fond  dans une dialectique entre Dieu, Una Sancta et l'homme. De fait l'Eglise visible est sociologiquement repérable et Una Sancta épouse l'homme, elle s'incarne par la prédication et les sacrements car elle doit s'affirmer dans une réalité sociologique sinon elle n'existe pas. Calvin est allé très loin dans ce sens et dans ses héritiers seulement  Bonhoeffer serait aller plus loin ou plutôt autrement ? (ceci mériterait un autre développement)
Calvin traite ainsi de la question de l'Eglise par deux voies au moyen de la dialectique. La grâce n'est pas dans ce signe, elle l'accompagne.
La théologie catholique affirme l'existence d'un lien dynamique d'échange entre Dieu et l'homme qui se donne en Christ : l'Esprit Saint lui-même. Mais elle témoigne aussi  de la triple mission de l'Eglise dont parle le Concile Vatican II qui est un peuple composé de fidèles, qui se formule en trois mots : Prêtre, Prophète et Roi (Lumen Gentium 34, 35, 36).

Les indulgences représentaient, dans l'Eglise catholique, une réponse à quelque chose qui faisait partie de la nature humaine, l'angoisse de la mort et de la damnation. Néanmoins l'idolâtrie a ses limites, ce que l'on recherche avant tout c'est la pureté, mais en vertu de la conscience de la Miséricorde divine, " soyons donc indulgent avec les indulgences ! ".

Prédestination

Les concepts théologiques de la double prédestination,  du salut éternel et de la damnation éternelle, en vertu de la décision souveraine, même Calvin ne s'y est pas véritablement attaché car c'est une voie sans issue. Ce principe d'élection divine qui consiste à ne sauver que quelques élus touche directement l'homme, car elle est binaire. Jacobus Arminius, (initialement disciple de Théodore de Bèze), continué par ses partisans, s'était opposé à cette idée.
Le synode de Dordrecht en 1618 s'est conclu sur le rejet des positions arminiennes et a précisé la doctrine de la réforme.
Le concile Vatican II  en 1965 a réaffirmé le salut pour tous.

Conclusion

Tout ce qui vient d'être dit se place dans un contexte historique donné. Le livre est au centre et le sacrement est l'expression de l'Ecriture. La différence entre l'Eglise Réformée et l'Eglise Catholique est que pour cette dernière, la communauté est marquée de façon constitutive par le ministère ordonné. C'est à partir de là que se forge la vie chrétienne de la communauté. Le pasteur est consacré mais il ne l'est pas à vie, tandis que le prêtre est ordonné à vie. 

 

2008/06/13 - Œcuménisme - Chronique d'un voyage à Noyon

Category: Délégation du Diocèse de Pontoise - Documents liés
Créé le mercredi 5 août 1908 09:20

Le 13 juin dernier toute l'équipe diocésaine de relations œcuméniques s'est rendu à Noyon ville natale de Jean Calvin un de grands réformateurs du XVI siècle (1509-64). Nous étions accompagné du Pasteur Jean-François Ragaru de l'Eglise Evangélique Libre. En voici le texte d'un membre de l'équipe.

Chronique d'un voyage dans la petite ville de Noyon

Nous voilà en route pour ce Noyon inconnu, une étonnante destination, à l'orée d'un week-end tout proche.
Oui, en route pour une autre époque, celle de Calvin, un homme chercheur de Dieu qui a influencé pour longtemps la vie spirituelle de bien des hommes.
Au musée qui porte son nom, les objets, les livres, les photos, protégés dans leur vitrine, nous parlent des êtres de ce temps, de leurs échanges, de leurs certitudes, de leurs voyages.
Ces objets, ces livres qu'ils ont touchés, pétris de leurs mains, laissent passer une touche d'eux-mêmes et les font surgir devant nous.
Quand nous nous penchons sur ces bibles, nous nous souvenons qu'elles ont nourri leur vie, fait vibrer leur âme.
Et pourtant en ce temps de l'histoire, les dissensions à propos de la bible ont conduit les hommes hors du projet de Dieu d'unir tous les hommes en son cœur.
Au lieu de confluence de l'humain et du spirituel, le projet de Dieu a dérapé.
Comment croire que Dieu a voulu la division des hommes ?
Comment croire que Dieu aurait parlé à quelques uns en oubliant les autres ?
Dieu est un créateur.
Il crée la vie avec bonheur et délicatesse.
Et, pourtant en ce temps de l'histoire, les hommes se sont laissés emportés par leur déraison.
Quand bien même, il y avait un vrai sujet de discorde, comment a-t-on pu oublier la prière ?
Comment a-t-on pu oublier la patience, celle de Dieu qui travaille le cœur des hommes ? Comment a-t-on pu oublier de se laisser guider par son Esprit ?
Ne valait-il pas mieux prendre le temps d'un espace-temps pour se comprendre et témoigner de cet évangile exigeant de fraternité, d'amour du prochain, de pardon et de réconciliation.

Le tableau du 1er étage que cache son rideau est révélateur. Il crie la profondeur de l'abîme noir qui possède les hommes.
" Toi, l'autre, qui ne suit pas mon chemin, toi le différent, je t'exclue, tu m'exclues. "
L'artiste a si bien saisi l'humain qui se défend de l'autre et le voue au pire de ce monde quand l'un et l'autre ne se reconnaissent plus.
Dans ce monde là, Dieu est exclu, quand bien même on s'y réfère. C'est un pauvre visage de lui-même que l'on nous présente.
Et de blessure en blessure, l'histoire se détourne.
D'habitude en habitude, de vie exclue en vie exclue, la différence se creuse et nous nous perdons de vue.
Souvenons-nous de la prière de Luther qui demande que tout redevienne comme avant.
Etonnant Calvin qui aujourd'hui nous réunit autour d'une table et qui noue un échange entre nous où le désir de se connaître se joue de tous les clivages.
Bien au contraire en les mettant en pleine lumière, l'occasion est donnée de les faire vivre et les faire avancer vers leur destin futur.
C'est une chance donnée à l'Esprit de Dieu de les habiter pour les conduire enfin sains et saufs (et sans sauf-conduit !) vers son projet qu'est l'unité de tous les hommes en son cœur.
De petits pas d'amour en petits pas d'amour, notre Père des cieux tisse la toile de son œuvre ;
Si l'histoire fait resurgir les maux et les mots, n'oublions pas que Dieu fait fleurir nos faiblesses, qu'il comble nos blessures pour y faire grandir notre vie intérieure.


Cette expérience amère de notre histoire est aussi une chance de quitter une rive pour une autre rive, terre promise d'un pèlerinage avec nous-mêmes, miroir du pèlerinage de tous, ces autres nous-mêmes.
La vraie question aujourd'hui n'est-elle pas ? Sommes-nous prêts à donner une chance
à Dieu d'accomplir son projet ?
Sommes-nous prêts à nous abandonner à la guidance de son Esprit pour y parvenir ?
Proposition sans cesse renouvelée à notre humanité ?
Au cœur de notre être, l'Esprit de Dieu s'incarne. Comme, autrefois, notre humanité ferme souvent les yeux sur sa proposition de nous abandonner à sa volonté, à moins que…..
Si la Parole, l'Ecriture, sont si importantes, c'est parce que nous laissant guider par l'Esprit, elles vont livrer un message à nos questionnements.
" Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je serai au milieu d'eux " et,
Lorsque viendra l'Esprit de vérité, il vous fera accéder à la vérité toute entière. Car il ne parlera pas de son propre chef, mais il dira ce qu'il entendra et il vous communiquera ce qui doit venir."
(Jean 16,13) 

Et si pour tous ces clivages qui portent la clé de nos incompréhensions tout un chacun acceptait de se laisser guider par l'Esprit, le Seigneur nous ferait découvrir sûrement sa vérité pour son Eglise.
Certes, les théologiens ont beaucoup travaillé et travaillent encore. Mais nous tous, les uns et les autres n'avons-nous pas à nous laisser gagner par l'Esprit ? C'est ce passage qu'il nous invite à traverser avec notre bâton de pèlerin en y invitant tous ceux qui sont prêts à entendre la voix de Jésus-Christ.

 

Charline

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